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Textures et support

Ecrit dans technique, lu 13 112 fois avec 7 commentaires.
Marqué comme illustration, tutoriels.
Ecrit le mardi 14 juillet 2009, publié il y a 13 années.

Comme vous l’avez peut-être, sûrement, remarqué, j’aime beaucoup travailler les textures dans mes images. Que ce soit de la roche, de l’eau, des nuages, etc. C’est un travail passionnant et cela fait un bon bout de temps que je souhaite aller un peu plus loin avec cet aspect de ma technique. Faire quelques expérimentations. Comme expliqué ici et là, je travaille un peu toujours de la même manière. J’imprime mon crayonné sur la feuille, tend la feuille, fixe le crayonné, sature le papier avec une couche de brun assez liquide et passe à la mise en couleurs là-dessus.
Le grain du papier me sert beaucoup pour faire les textures. Avant même de poser les couleurs, cela donne un peu de matière, de piqué, car le grain va retenir (ou pas) les couleurs, quelques petites aspérités, une couleur parfois un peu frottée, etc. Les textures vibrent un peu plus, ce que ne permet pas un papier lisse avec ma technique par exemple. Je prends d’ailleurs toujours du papier 224gr pour un grain plus marqué et appuyé.  Cependant, j’avais bien envie de creuser un peu. Dans mes illustrations, dans les grandes lignes, il y a deux sortes de « zones texturées ». Celles que je texture moi-même, comme ce nuage ci-dessous par exemple. La peinture est quasi pure, très empâtée. Les reliefs des coups de pinceaux accrochent la lumière et donne de la vie au nuage, du mouvement.

texture01

En revanche, là où la peinture est très diluée, comme  des glacis superposés, les textures sont presque lisses et c’est le grain du papier qui donne quelques frémissements. Ce qui me convient tout à fait et le contraste entre zones très travaillées et zones plus légères donne un résultat sympathique. Cela permet même de guider l’œil du lecteur vers certaines parties de l’image, mais ça c’est une autre histoire.

texture02

Le hic, c’est que, parfois, à l’impression ou au moment de scanner, le grain des parties où l’acrylique est très light est presque imperceptible. Le grain apparaît trop timidement et les textures semblent plates, lisses, un peu comme un bon remplissage Photoshop au pot de peinture. Il suffit de se reculer ou de plisser les yeux en regardant l’image ci-dessus pour s’en rendre compte ; ce que le détail du nuage supporte plutôt bien. C’est dommage car cela casse l’équilibre entre le gras et le maigre dans les images, entre le texturé et le glissant. Il faut alors se tourner vers les originaux pour bien saisir la différence (et je rejoins ici la problématique du papier/écran/impression évoquée dans Et mon écran c’est du papier ?!).
J’avais lu un article enrichissant de James Gurney qui n’avait mis la puce à l’oreille à propos des peintres (et lui-même) qui « pré-texturent » leurs peintures. C’est-à-dire qu’on passe au début une couche de peinture transparente sur son support pour donner plus de relief à ses textures. Et ce avant la mise en couleurs. J’ai fait des essais récemment et ça fonctionne plutôt pas mal, c’est plutôt concluant. J’ai acheté plusieurs Gesso et gel pour tester et j’ai retenu un « Heavy Gel Structure » de chez Pébéo, facile à appliquer, transparent et pâteux.
Je trouve que le piège avec les Gesso et autres gels, le risque, c’est d’en tartiner des louches à la va-vite sur son support avec un énorme pinceau aux poils durs. Un peu n’importe comment. C’est d’ailleurs ce qui me freinait. Alors oui, yes, ça va faire un super effet peinture parce qu’on va sentir du relief, de la matière, de bons gros coups de pinceaux. Mais quel intérêt si le passage de cette sous-couche n’a aucun sens ?
J’ai donc pris le parti de peindre avec cette sous-couche transparente. Ne pas l’étaler dans tous les sens mais déjà modeler les textures des volumes avec ou leur donner une direction, un sens de mouvement. Structurer les différents éléments de l’image très en amont. Avec des pinceaux de tailles différentes. C’est d’ailleurs assez amusant de peindre sur son crayonné imprimé avec une matière transparente, il faut trouver le bon angle de lumière pour y voir quelque chose… Ci-dessous, un détail d’un ciel (d’une illustration récente que je ne peux malheureusement pas encore vous montrer intégralement), de très près. J’ai donné du mouvement sous la peinture et ça se sent. La couleur est passée de manière très légère, sans frotter ni empâtement.

texture03

Le même ciel vu de plus loin. Ma mise en couleurs suit les mouvements de la sous-couche et il me semble que le ciel est renforcé, plus dynamique ainsi. On peut aussi voir se mélanger les deux textures, le grain du papier et la sous-couche. Un peu difficile de s’en rendre compte sur écran mais les textures sont plus tendues et nerveuses ainsi.

texture04

Et un autre détail où la sous-couche apparaît et redessine les vagues, les fait vibrer. Sous ce détail, un autre tiré d’une illustration réalisée il y a deux ans, sans sous-couche. Même si ce n’est pas la même image ni le même dessin, les vagues me semblent un peu plus molles et moins énergiques que maintenant.

texture05

texture06

Je récapitule. Désormais, j’imprime mon crayonné, je tends la feuille, je fixe tout ça, je passe mon jus brun, je peins une première fois avec la sous-couche et je mets en couleurs là-dessus. Ca rallonge un peu le temps de travail mais au final, je me dis que ça peut enrichir les textures et leur donner plus de force, de profondeur, plus de pêche sans sombrer dans les excès de l’effet peinture. Et ça ne m’empêche pas d’aller encore plus loin sur certaines parties (comme la première image avec le nuage) en travaillant vraiment en épaisseur. En plus, je peux texturer doucement et préserver quelques zones à détailler avec des pinceaux très fins par la suite. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de faire des détails avec un minuscule pinceau sur de la toile à gros grain, ce n’est pas toujours évident… Je vous en reparlerai quand je pourrai présenter ces dernières réalisations. A suivre 😉


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7 commentaires.

  1. Christophe, le mercredi 15 juillet 2009 à 12 h 40 min, a écrit :

    Je pense que tu pourrais peut-être gagner encore en vivacité de la touche si tu repasses un jus brun sur certaines zones après ton gel texturé, ainsi le jus s’insère dans les sillons les rendant plus foncés et lorsque tu passes à la couleur, ces parties resteront plus foncées, tandis que d’autres non, à toi d’anticiper les zones où l’impact serra profitable, mais dans le cas des vagues en plus du relief si la teinte “joue”, je pense que c’est pertinent et plus visible à l’impression. C’est une idée comme ça à tester…
    En tous cas je trouve le résultat intéressant même si des zones lisses sont agréables dans un ciel. C’est très pertinent dans les vagues par contre et efficace, bravo.
    As tu essayé la toile ou le papier toilé où la trame est plus visible que le papier à grain ?

  2. Vincent Dutrait, le mercredi 15 juillet 2009 à 13 h 29 min, a écrit :

    Merci pour cette idée, à tester.
    Et pour la toile ou le papier toilé, c’est délicat. J’ai déjà essayé auparavant et même si ça donne un joli effet de texturé, j’ai toujours trouvé la trame trop régulière, systématique, trop uniforme. Et c’est pour ça que j’ai cherché autre chose, ça ne me convenait pas.

  3. Vincent Dutrait, le mercredi 15 juillet 2009 à 16 h 39 min, a écrit :

    Aussi, quand on travaille avec de la toile ou du papier toilé fixé sur un support rigide, il faut un bon scanner bien puissant qui puisse scanner comme il faut une image qui n’est pas plaquée sur la vitre…

  4. Jipé, le samedi 18 juillet 2009 à 22 h 25 min, a écrit :

    Petite question en passant. Est-ce que ce genre de médium conserve l’aspect mat de l’acrylique et le côté absorbant du support ou bien est-ce que ça plastifie un peu le papier et lui donne un côté brillant? ❓

  5. Vincent Dutrait, le dimanche 19 juillet 2009 à 14 h 39 min, a écrit :

    Oui cela a tendance à « plastifier » le support et le papier fait moins buvard. L’idée c’est de ne pas couvrir entièrement la surface de son papier pour justement laisser des zones absorbantes et d’autres non. Ensuite, au final, bien entendu, il y a des parties brillantes, d’autres mattes. Ce qui ne se voit pas sur scan mais sur original. Pour uniformiser l’original, on peut toujours passer un coup de laque ou de fixatif. Ainsi on ne voit plus de différences de brillance.

  6. Jipé, le dimanche 19 juillet 2009 à 17 h 00 min, a écrit :

    Bon, ben y a plus qu’a essayer pour voir ça! Tant que le côté brillant ne gêne pas au moment du scan, ça va. En tous cas j’ai hâte de voir ce que ça donnera sur tes futures images ! Merci pour l’info 🙂

  7. pierrot, le jeudi 28 janvier 2010 à 10 h 45 min, a écrit :

    Merci beaucoup cher Vincent, de nous livrer toutes ces actuces, lesquelles semblent tout à fait judicieuses et efficaces et nous ouvrent un peu plus les yeux sur les mystères et les secrets de ta technique.
    Fervent adepte des techniques traditionnelles, j’apprécie également ces effets de matière qui renforcent le dynamisme et la profondeur d’une mise en couleurs. Il est toujours appréciable d’avoir d’autres avis et impressions de confrères sur les méthodes de travail.
    Alors que certains conservent jalousement leurs petits trucs, le fait que tu n’hésites pas à révéler ton approche des matériaux et des supports est une initiative tout à fait louable et remarquable.
    Encore merci pour ces précieuses révélations.

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