
Vectorisation et anticipation
Durant ces derniers mois, j’ai travaillé sur un gros projet jeunesse avec beaucoup d’illustrations noir et blanc (plus de cent cinquante vignettes et croquis !). La principale contrainte était que ces images soient au trait noir pour être ensuite plaquées par l’éditeur sur des fonds texturés, parchemin, papiers divers comme dans un carnet de voyage. Un équivalent au mode Produit d’un calque dans Photoshop. Donc comment obtenir de jolies images encrées sur calque avec un fond transparent ?
Ayant pour habitude de travailler sur des illustrations « fermées », couvrantes et d’un seul tenant ou facilement détourables, je n’avais encore jamais été confronté à ce genre de questionnement technique.
Ma première idée fut de crayonner légèrement les images et les reprendre toutes au trait avec un feutre noir. Une fois scannées, les passer dans Photoshop et avec Sélection/Plage de couleurs, isoler le blanc du papier et le supprimer pour avoir le dessin sur calque avec fond transparent.
Mais malheureusement, je ne fus pas satisfait car même après plusieurs tests et essais, il restait toujours une petite frange de pixels plus ou moins grise et cracra autour des traits noirs. Fourmillement qui risquait de se remarquer au final. Et difficile d’avoir une image bien « clean » sans bouffer des détails en poussant les paramètres de sélection.
De fil en aiguille, j’ai creusé du côté d’Illustrator et de la vectorisation. Et là bingo.
J’ai ouvert les scans bruts de mes images au trait et les ai vectorisées via les options de vectorisation de la vectorisation dynamique. Je n’ai pas compris tous les libellés des options, paramètres et réglages et j’y suis allé à tâtons jusqu’au bon compromis entre finesse des traits et respect des détails.
A gauche le scan brut et à droite le résultat de la vectorisation.
Après plusieurs bidouilles, je suis parvenu à un résultat concluant et en cochant « ignorer le blanc », le fond passe en transparent. Au final, je me retrouve avec des images au trait noir, bien nettes, aux contours et aux formes bien propres. Et donc sur fond transparent.
Ce qui permet sans soucis de les plaquer sur n’importe quelle surface. Ça fonctionne très bien sur des images déjà au trait et plutôt propres mais ça peut aussi passer sur des crayonnés soignés et appliqués sans trop de valeurs de gris (pour certains travaux plus complexes, cela peut certainement permettre de faire sauter une éventuelle phase d’encrage).
J’en viens maintenant à la deuxième partie du titre de cet article, l’anticipation. Pour ce genre de projet où il faut gérer beaucoup d’images et d’ailleurs pour tout autre projet, je pense qu’il faut absolument anticiper le rendu final, avoir une bonne vision de l’ensemble de l’ouvrage et ne pas travailler dans le vague.
Dans le cas de ces images-là, je sais qu’elles seront très petites dans le livre. En faisant des tests à l’échelle et en essayant de me projeter au mieux, je me suis aperçu qu’à cette taille, un rendu au trait fait à la main ou aidé d’Illustrator ne changera pas grand-chose à la qualité et à la définition de l’image. Il vaut donc mieux se focaliser sur l’aspect technique de l’affaire (le fond transparent par exemple) pour assurer une belle cohérence à l’ensemble de ses images et, surtout, au livre.
J’ai procédé ainsi pour une bonne partie des images noir et blanc de l’ouvrage. On perd peut-être un peu le côté « naturel » d’un « vrai » encrage à la main mais au bout du compte, au vu des petits formats, ça passe très bien.
En plus, grâce à la vectorisation dans Illustrator (que l’on peut scripter et automatiser), j’ai gagné un temps considérable que j’ai pu consacrer aux images en couleurs de la commande et à d’autres parties du livre.
De temps en temps, même dans l’urgence, je pense qu’il est bon de prendre du temps et surtout du recul pour trouver la technique la plus adaptée à ce que l’on doit livrer. C’est peut-être périlleux sur le coup car on peut craindre de perdre un temps précieux en expérimentations, mais sur le long terme c’est tout bon. A tester 😉
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J’utilise aussi cette technique depuis un moment pour certaines illustrations et c’est vrai que c’est magique! Mais il faut bien sur que le crayonné soit poussé et précis au préalable. Super ton article 🙂
et scanner en mode trait 1200dpi puis passer sous photoshop en mode gris, valeur 1, 300dpi, ça devrait aller aussi comme technique! celle utilisée pour la BD!
Yep j’ai essayé aussi mais c’était un peu moins propre. J’ai trouvé que la vectorisation faisait des traits plus nets et moins « granuleux ».
Aussi, scanner en « mode BD » respecte scrupuleusement le crayonné ou l’encrage alors que la vectorisation permet d’apporter quelques courbes, pleins et déliés en plus (avec parfois d’heureux imprévus). Ce qui correspondait à ce que je cherchais. Avoir l’effet « encrage » sans vraiment encrer à 100%.
C’est vrai que le côté “encrage” de la vectorisation, qui donne parfois des pleins et des déliés, correspond bien à ce que tu fais toi-même à la main d’habitude. En plus, ça a l’avantage de donner une image redimensionnable à souhait ! 🙂 Pour ce projet précis, ça n’était pas le but (vu la taille des images) mais dans un autre contexte, c’est appréciable.
Pour passer un dessin en noir/blanc aussi pur que possible, outre le mode de transparence “Produit”, j’avais pour habitude de faire simplement un réglage “contraste / luminosité”. Désormais je fais quelque chose d’un peu plus tordu, mais vachement plus précis : je crée un calque rempli de noir, je lui assigne un masque d’opacité (vide), et je copie-colle dans ce masque mon dessin original (en négatif) ! Comme les zones noires du masque sont transparentes, et les zones blanches sont opaques, l’opacité de mon calque se fait naturellement à partir des valeurs (inversées) du croquis.
L’avantage de cette méthode c’est que c’est 100% fidèle au dessin d’origine, aucun contour “bouffé” ni nuance perdue ; et pas besoin d’un mode de fusion spécial, le mode “Normal” convient parfaitement tout en n’ayant pas de contours gris clair dégueu autour des traits.
L’inconvénient, c’est que ça ne purifie donc pas l’image et que la moindre zone un peu sale sur le papier restera visible, une fois en masque de calque ; de même, si le trait d’origine n’est pas assez noir, il ne sera pas 100% opaque une fois en masque. Mais ça peut se régler après !
Pezito> Si ta technique est tordue alors que dire de la mienne ! 😆 Je dois remporter la palme. Je garde mon trait normal en produit, en dessous je crée le soutien du noir avec 60% de chaque couleur avec le trait négatif en masque, et je règle les couleurs du calque trait pour n’avoir que du noir pur mais en gardant la même épaisseur (donc un bon bricolage dans le mélangeur de couche)
Sauf que, j’ai justement découvert aujourd’hui que ta technique est carrément plus simple, il suffit de remplir le calque avec 100noir et 60cmj pour avoir un trait nickel, d’un noir soutenu comme il faut et qui ne fait pas de liserait avec le calque couleur, donc pas besoin de mettre en mode produit.
Et dire que j’avais jamais essayé cette technique pensant que c’était trop capilotracté. Je me déteste 😀
Bonjour Vincent,
j’ai lu avec attention ton billet et je me demande si tu connais la touche magique de photoshop, en l’ocurrence la touche “Q”…
Si “oui”, laisse tomber la lecture qui suit. Si “non”, ça devrait t’interesser!
Quand tu as scanné ton illustration en noir et blanc. Tu vas dans la partie “réglages” et dans “niveaux”, tu désignes dans ton dessin les parties des “noir absolu” et de “blanc absolu” avec les pipettes “noire” puis “blanche”.
Puis, dans le “menu calques” (F7), tu double-cliques sur le calque de fond pour le transformer en calque modifiable.
Ensuite tu sélectionnes toute l’image (Crtl+A) tu la copies (Crtl+C) et là, tu appuies sur la touche Q. Tu verras que la couleur de ton calque dans le menu calque passe au gris.
Tu colles ensuite le contenu du presse-papier et le noir de ton illustration passe en rouge. Ttu ré-appuies sur Q pour repasser en mode normal. ton illustration est maintenant en mode “sélectionnée” (tracés pointillés).
Tu appliques maintenant un masque de fusion (icone en bas du menu calque) tout en appuyant sur la touche “Alt”; tu retrouves alors directement ton illustration dans le masque de fusion ainsi créé.
Tu recliques dans la partie image de ton calque (toujours dans le menu calque) puis tu effaces ton dessin (si, si!) puis, à l’aide du pot de peinture, tu remplis de noir et ainsi tu as ton illustration en noir et tout le blanc est devenu transparent.
Tu peux appliquer alors le masque de fusion de manière définitive (clic droit sur le masque de fusion dans le menu calque et “appliquer le masque de fusion”).
Voilà, le tour est joué! L’intérêt de cette méthode c’est qu’à la place du noir, tu peux appliquer un remplissage de n’importe quelle couleur, d’un dégradé, d’un camaïeu, d’une trame ou de n’importe quelle couche pixel que ton imagination t’impose!
En espérant t’avoir un peu aidé. 😉